pinterest

mardi 2 mai 2023

DONNER A L’ARBITRAIRE

DONNER A L’ARBITRAIRE

 

Je fais l’amour aux mots, avant de m’endormir

Au fusain d’un tableau dont l’espace dévêt

Des orbes, aux atomes, les miasmes couvés

De fines molécules que l’on voit s’affermir.

 

J’écris des rires pleins et des larmes feutrées :

Absurdes commérages, traitresses pulsions

Ajustés à la pointe de ces répulsions

Dont le poète écarte en ses lunes nacrées,

 

Du triste parchemin, si la folie s’arrime

Aux râles des parèdres qui de l’Eléphantine

Où glissent les felouques, se grisent de comptines,

Quand le Nil apprivoise les naïades intimes.

 

Je fais tanguer les mots enfiévrés de musique,

Bercés de catachrèse en l’absurde parfois…

Les couvre d’une étole aux frimes de grands froids,

Au sommeil de l’ennui démuni de rythmique.

 

J’épointe du verbatim l’oralité, sans surseoir

A la divulgation d’autonomes écrits…

Ma plume fait du style un tronçon circonscrit

Aux lexicalisés de brèves métaphores, au soir

 

Désaccordé de fuyantes étoiles prises au rets

De la voie émaillée de poussières astrales ;

Aimerais dominer en combattant captal,

Les anneaux de Saturne, lorsque s’y vient mirer

 

Soliste liant des belles lettres, le cunéiforme

Dont l’aciculaire pic écorche le graphème

A la massore du récit hébraïque : anthem

Pour vieux scribes ennoblis pour la forme…

 

Je caresse du verbe le froncement, puis carde

Du rétif entrelacs, la généreuse donne,

Evinçant l’idiome que le sabir bedonne

Sans de ce barbarisme allouer cocarde.

 

Je donne vie aux mots translatés du jargon

Utile aux fantaisistes de l’amphigouri…

J’en rabroue vertement la sanieuse tourie :

Ce hideux empaillage, ce vulnérable gond.

 

Ma rime tacle les mots de la déconvenue ;

Chatonne l’iambe de suaves fragrances,

Oint l’hellénique scazon d’indulgence,

Parfume la césure d’un nard soutenu…

 

Si j’avais de Tite Live, en l’historiographie,

Comme le dit Sénèque, fibre philosophique,

Redresserais du palindrome, en cacique

Le désordre mutant, la gibbeuse atrophie.

 

Donnerais aux édits de Malherbes, évidence

Déniée de Choiseul, qui de la Pompadour

Aspira bienfaisance saluée de troubadours

Affectés aux salons de cette concordance.

 

Au sieur Despréaux : Nicolas Boileau, offrirait

Disponibilité ; sûr de voir mûrir Horace, Juvénal ;

Serais présent aux côtés de Lutrin, pour du vénal

Confesseur Le Tellier, brider la mitre empierrée.

 

Il est un autre Malherbe que j’aimerais saluer :

François, ce grand poète ; Tallemant des Réaux

Le disait pourtant rustre (…) se peut-il, en fléau

Exciter du jaloux, sans qu’il s’y fasse huer,

 

Admonester pérore (?!) d’un superbe hémistiche,

Boileau le consacra : _ « Enfin Malherbe vint… » 

Tes stances, cher poète, en l’aube qui survint,

Ont ravivé en moi de nobles acrostiches.

 

Vous, mots du temps passé, obsolescents vocables,

Je vous dois, sevré de la métrique, conscient

De museler l’infidèle prosodie_ cela, à escient,

D’être moi aux pires aléas d’ires insoutenables.

 

Vous dédie en ces longues travées, heureux,

Mon pas de fugitif, ma marche évasive ;

Conforté à l’idée de naître, en l’imaginative,

Piètre damoiseau, certes ! … mais toujours amoureux.

 

Armand Mando ESPARTERO© copyright 2023