Froides cendres
Le temps a fané mes plus beaux souvenirs,
Etiolé mes passions, brisé mes aquarelles ;
Ne me reste_ hélas ! _ à l’ombre des
marelles,
Qu’un vieux trottoir gris, gris en ce devenir.
Je n’avais plus de larmes aux volets de mes pleurs,
Plus de rires moussus à mes lèvres gercées ;
Mes yeux délavés fardaient sans les percer,
Les étranges volutes qu’entretissaient les peurs.
L’amour a travesti de mes peines d’enfant,
Avant de s’en repaître, les fiévreuses brimades ;
Les injustes blâmes… à m’en rendre malade ;
Le knout sur ma peau blême pourfend
En de sombres clichés, la vision dont le gnard
Aux permanences creuses, quand chahutent
Les vents, s’enflent sur la froide cahute,
Les ires dont se musse le fébrile geignard.
Au for de l’agonie, se dépeuplent les nuits,
S’éparpillent les rêves de la monomanie ;
Se vide la trémie aux tièdes insomnies
Dressées sur la paroi dévoilant mon ennui ;
Que ne suis-je bohème de la prime jeunesse !
Celle que les trompeurs, en détrônant la chair,
Accusent d’être née de possibles vertus :
enchères
Aux algarades d’adultes enfumés de détresse.
La joie s’en vient éteindre les souffrances
miennes,
Mais sans y parvenir… j’ai dépecé mon double,
Avant de le vider au caniveau que troublent
Les mortes eaux dupées d’ondes diluviennes.
Inclassable souffre-douleur au martyrologe
De l’âme enkystée d’amertume, je déambule,
Le cœur pris au filet de diffus préambules
Justifiant l’impur en quête de faux éloges.
Je ne sais plus aimer… ma vie se fait rétive
Quant aux promesses de la gent séductrice ;
Purgerai-je un jour, de cet ardent supplice,
Les profondes entrailles ? … Fautive,
En ces désordres pleins, ma pensée édulcore
De la béance, l’écorchure du mâle, l’estocade
Portée de malhabile main, sous l’arcade
D’un profil au mien semblable : un corps
Voûté par les années: une horrible dégaine
De bouc-émissaire conspué de nonces,
Autant que de la valetaille, aux ronces
Du tropisme flouté, enivré de rengaines.
Ma silhouette percluse en ces dérives
De déshérence pistée du dédaigneux,
Voit s’émietter l’espoir du besogneux
Au lourd bedon de la caste jouissive.
Souvent percé de dagues princières,
Je vomis du passé, d'ultimes stellionats,
Ces legs de médicastre implorés de l’agnat.
Goutte à goutte, s'y vide l'existence…
Qu’y faire ! suis-je de ceux dont on
dit :
Personne, n’a comme lui, en schème de dédit,
Vu mourir la raison semoncée d’exigences(?!)…
Armand Mando ESPARTERO© copyright 2021