TUNC
CURRERE DE NULLO DILECTU*
Courir sans s’enquérir du temps
Je cours à perdre haleine
Sur les routes de cendre,
Les primes sentiers de décembre,
Où la neige blanche comme laine
Gélifie les marcottes sans membres.
Je cours entre les nuits d’orage,
Les matins poudrés du fin pollen
De fleurs, de graminées de plaine
Qui aux vents chauds, voyagent.
Je cours sur l’avenue où s’accotent
Les ombres du pesant macadam,
Profils défroissés, et qu’enflamme
Le soleil d’été aux spires dizygotes.
Je cours pour m’estourbir en juillet,
Me griser de l’absence des mânes,
Quand l’exine couvre encor l’arcane
Du cristallomancien au verbe guilleret,
Pérorant fables à la gent crédule,
Ces butors oints de manichéisme,
Fardés à outrance du syncrétisme,
Lestés du sequin gonflant réticule.
Je cours entre les rires de drôlesses,
La moue affectée de pucelles coincées ;
Leur croupe ankylose la marche poncée
Des gazilles que tiennent en laisse,
Les démons de midi triturant la pensée
De septuagénaires fringants, charmeurs,
Lovelaces qui en l’aube se meurent
Au son de l’invite vertement tancée.
Je cours loin des haridelles fourbues,
Carnes du passé, enivrées de promesses,
Pollicitations de psylles… aux messes,
En reptation, savourent, s'ils l'ont bu,
Le vin d’obédience piégeant l’affligé
Conglutiné aux lèvres mensongères,
Figées, d’impudiques mégères:
Chattes désordonnées se laissant infliger
Quelque rixe sur la couche adultère,
Quand louvoient sous suées, la chair,
Et l’esprit d’amants pris aux torchères
Du vice consommé… ô devrais-je le taire (!?)
Je cours en félibre moqueur, scalde gai
Dont la plume interpelle l’audace, nu
Sur le parchemin cuivré… ingénu,
Peut-être ! En
tous cas, intrigué
Du manège de la rime musarde,
L’iambe qui, du circonstancié annihile
Broutilles de négoce ; plus subtile,
L’ouïe idoine capte, sans hardes,
La réminiscence dont l’aquatinte
Atténue de l’eau forte les tons ocrés,
Calme du lavis, les plis vifs, ou nacrés
D’œuvres contadines éteintes.
Je cours sur la baie des tropiques,
Dessous la canopée, seul, atone,
Au Phébus aspiré de vagues gloutonnes
Sous l’iode bleu de l’océan oblique
Sur la lagune de corsaires vaincus ;
Leurs traces maculent de nos rives,
Le sable talé de princes en dérive,
La plage entoilée de souvenirs vécus.
Je cours vite au relais de l’angoisse,
Sans faire pause au nord des lubies,
Défait du sophisme liant l’ébaubi,
Qu’isolent honte, ignominie, poisse
De déshérences... inhibition ;
Le velléitaire en suçote mamelles ;
Pusillanime, en l’instance formelle,
Taie de la superbe l’étrange accrétion.
Quand j’arriverai, vainqueur serein
De pérambulations, de baguenaude,
Serti d’un baccalaureus
de roi, en l’ode
D’un scalde de faubourg, l’alexandrin
Sublimé d’hémistiches, confiera
En conciliabule, sans réserves aucunes : _
Il a su
des contrées, délesté de rancunes,
Apprivoiser
du flot d’irascibles lagunes,
L’itératif
débit… bien fol qui s’y fiera !
Vous saurez, braves gens sceptiques,
Aporétique espèce de l’histoire,
Que de mues enfiévrées, transitoires,
Émanent souvent des challenges caustiques !
Armand Mando
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